vendredi 16 novembre 2018

AMHA : traduction or not traduction

Comme tout auteur avec un minimum d’égo (comme tout auteur, donc) je me suis posé la question de la traduction de mes œuvres et j’ai creusé le sujet.

Pourquoi traduire ?
Simple : pour être accessible à un plus grand nombre de lecteurs et, par voie de conséquence, vendre plus. En théorie, ça fonctionne mais …

Les ventes supplémentaires seront-elles suffisantes pour “rembourser” le coût de la traduction ? En effet, le marché francophone n’est pas minuscule, loin de là, même si mon seul canal de distribution actuel (Amazon) n’est pas très présent (voire pas du tout) dans la majorité des pays francophones (en Afrique, notamment). Alors quand je vends dix exemplaires d’un roman en français, puis-je vraiment m’attendre à en vendre beaucoup plus dans une autre langue ? Rien n’est moins sûr.

Quoi que…

Dans quelle langue ?
Par habitude culturelle, presque tous les auteurs que je peux croiser (sur des forums) veulent traduire en anglais. Pour tout le monde, ou presque, LE marché du livre est anglophone. Les best-sellers mondiaux sont presque tous écrits en anglais en version originale. Mais, est-ce que c’est une bonne idée que de vouloir attaquer d’emblée le plus gros marché ? Celui où se battent déjà les plus gros et les plus costauds ? Si je suis un petit poucet sur le marché français, qu’est-ce que je peux espérer sur le marché anglo/américain ? J’ose tenter une réponse : rien…

Alors quelle serait la solution ? Tenter d’autres langues ? C’est la piste que j’ai voulu suivre à une époque. J’avais même trouvé la langue “idéale” : l’arabe. Pourquoi idéale ? Parce que les arabophones sont très nombreux (entre 300 et 350 millions, selon les modes de calcul) et que le genre littéraire qui m’intéresse (policier et SFFF) est particulièrement pauvre dans cette langue. Mais ... je ne suis pas passé à l’acte. Pourquoi ? Pour plusieurs raisons. Je tiens à tout faire moi-même. J’ai parlé une version de cette langue, au quotidien, pendant près de deux décennies donc je m’imaginais capable de faire moi-même la traduction. Erreur ! D’abords, je ne pratique plus depuis près de trente ans (une langue ça s’oublie, comme le reste) et n’ai jamais été un vrai lecteur dans cette langue (faute de livres qui m'intéressaient). Ensuite, les outils de distribution actuels ne prévoient pas grand chose pour cette langue (à cause de son alphabet spécifique). Enfin, il n’existe pas un arabe unique. Une langue répartie sur un territoire aussi vaste et sur des peuples aux cultures et aux histoires aussi diverses ne peut pas rester unique. Il existe bien un arabe dit littéraire, mais il n’est pas adapté à des textes aux sujets “modernes” (pour de la philo classique ça irait, mais ce n’est pas mon rayon). Donc, on oublie cette piste (pour le moment).

J’ai aussi pensé faire la traduction en anglais (ben oui, moi aussi je voulais jouer à David qui s’attaque à Goliath) mais même si je lis régulièrement des livres dans cette langue, je me suis rendu compte que mon niveau pour faire le trajet dans l’autre sens (français vers anglais) est loin d’être suffisant.

Mais, assez parlé de moi. Il y a en France plein de communautés aux origines diverses. Plein de gens qui parlent autre chose que le français aux réunions de famille. Alors, à tous ceux qui le peuvent : traduisez vos livres en portugais, en espagnol, en polonais, en chinois, en vietnamien etc. Toutes ces langues aux marchés moins surchargés que l’anglophone pourraient (peut-être) accueillir avec bienveillance des oeuvres d’auteurs francophones moins mainstreet que les quelques grands noms qui leur parviennent.

Mais…
Il ne faut pas oublier que les livres, quelle que soit leur langue, ne se vendent pas tout seul.
 
Il faut exister sur le marché de ses lecteurs. Les grands ont droit à la télé, la radio et les journaux. Les moyens peuvent espérer des articles dans des journaux locaux et des interviews sur des radios, locales aussi (surtout pour ceux qui vivent en province et portent leur région dans leur oeuvre). Les petits doivent se contenter des réseaux sociaux et nager au milieu des millions (milliards ?) d’autres petits poissons qui occupent ce même espace pour diverses raisons.

Donc, pour vendre à l’étranger, quelle que soit la langue, quand on est auteur indépendant, il faut exister sur les réseaux sociaux dans cette langue. Beaucoup de pays sont tombés dans l'escarcelle FB, mais pas tous… ;-) alors il faut chercher et trouver un public dans le(s) pays visé(s). C’est un vrai boulot, peut-être plus difficile encore que la traduction (qu’on peut sous-traité).

Les autres pistes
Je ne suis pas le premier à chercher une solution autre que des professionnels (beaucoup trop cher pour un auteur auto-publié). J’en ai trouvé des solutions plus ou moins sérieuses en naviguant sur le web.

L’échange de bons procédés
Le principe est simple : trouver un auteur dans une autre langue qui chercherait à faire traduire son livre en français. Je traduis son livre en français et il traduit le mien dans sa langue. Là aussi ça semble bien en théorie. Chacun des deux peut utiliser son propre réseau pour vendre le livre de l’autre. Le coût financier est nul pour les deux. Tout va bien… Tout ?

Ben non, parce qu’on ne s’improvise pas traducteur. C’est bien plus complexe que d’écrire ses propres histoires. Il faut comprendre et transmettre dans une autre langue (la sienne) l’esprit d’un texte qu’on n’a pas écrit soi-même. Le texte peut contenir des références culturelles difficiles (impossibles) à rendre dans une langue différente, sans parler des jeux de mots et autres traits d’esprit qui sont souvent spécifique à une langue.

Il reste aussi le problème de la confiance et du contrôle. Comme chacun des deux peut-il être sûr que l’autre a produit une traduction fidèle ? Il faudrait faire intervenir d’autres personnes… ça commence à devenir singulièrement complexe pour un projet qui risque d’aboutir à deux ou trois ventes seulement…

Les traducteurs automatiques
J’ai aussi croisé ceux qui se posent la question, voire qui franchissent le cap et se servent des traducteurs électroniques, en ligne ou pas. Petit point de situation en ce qui concerne ces traducteurs : Ils commencent (certains) à être suffisants pour un usage touristique (demander son chemin, l’adresse d’un restaurant, etc.) ou tenir des conversation basiques avec des sujets bien cadrés (à condition que tout le monde y mette du sien et fasse des phrases simples). mais, pour ce qui de traduire une œuvre littéraire on est encore loin du compte. Dans les labos on parvient à faire des traductions presque bonnes sur des ouvrages techniques.

Donc, ce n’est pas une marche qu’il leur reste à franchir, ce sont plusieurs étages. J’ai pu constater avec une nouvelle distribué dans toutes les langues disponibles sur Google ce qu’on pouvait obtenir. L'originale était en anglais (américain). C’est la langue à partir de laquelle travaillent les algorithmes de traduction de Google, et celle avec laquelle ils sont les plus efficaces. Le résultat en français était … immonde. Le texte ne voulait rien dire, tout simplement. Heureusement, il était disponible gratuitement (ouf !)

Les professionnels pas chers
Sur certains sites on peut trouver des services proposés par des micro entreprises et autres auto-entrepreneurs qui vous proposent des traductions à prix cassés. Je n’en ai jamais testé mais comment ces services pourraient-ils être sérieux. Une traduction mal faite n'apporte rien à une œuvre, au contraire. On en revient aux problèmes des “échanges de bons procédés”.

Donc…
Vous l’avez compris. J’ai mis de côté mes projets de traduction. Un jour peut-être que je me relancerai là-dedans (si les hasards de la vie me font rencontrer un vrai bon traducteur) mais sinon ce sera tant pis.